Fiche numéro : 20

Mars - Meliton Bates

Personnage de la BD La Grande Arnaque de Carlos Trillo et Domingo Mandrafina aux éd. iLatina

Écrivain populaire d’un pays nommé « La Colonie », Meliton Bates a mis son imagination au service du Suprême Gouvernant en inventant pour lui les mythes supposés asseoir son pouvoir. S’il a tout d’un dandy snob trop plein d’assurance, il se montre en fait bien conscient des conséquences de ses compromissions et rêve de parvenir à dépasser sa lâcheté pour rattraper ses erreurs. Carlos Trillo réussit à placer son personnage au cœur d’un habile dispositif narratif. Car s’il est l’instigateur de la tragédie qui se joue ici, Meliton Bates, témoin des événements, se mue en narrateur omniscient et actif de cette histoire, s’adressant au lecteur les yeux dans les yeux.
Depuis 2019, les éditions iLatina effectuent un travail formidable de recherche et de publication d’ouvrages sud-américains qu’on pensait perdus pour certains.

L’ŒUVRE

Ça sent la fin de règne pour le Suprême Gouvernant de « La Colonie ». Le bruit commence à courir qu’il abuserait depuis toujours de sa nièce Malinche Centurion, plus connue sous le nom de la « Vierge Intouchable », archétype de la femme idéale promue par le régime.En danger de mort, celle-ci prend la fuite, se réfugie dans l’anonymat, et sollicite les services d’un flic déchu pour reprendre le contrôle d’une situation devenue trop périlleuse. Mais le dictateur lance à leurs trousses sa police politique, avec à sa tête son tortionnaire le plus cruel : l’Iguane.

L'AUTEUR

L’Historieta, la BD argentine, a une histoire bien trop riche pour être résumée ici. Carlos Trillo et Domingo Mandrafina sont tous deux nés dans les années 40 et font partie de cette génération d’auteurs qui a connue plusieurs âges d’or entrecoupés de grandes crises, en premier lieu la dictature militaire de 1976 à 1983, responsable de 30 000 morts et disparus. L’Historieta a été l’une des cibles du régime : Quino (Mafalda) s’exile, Hector Oesterheld (L’Éternaute) est assassiné. D’autres auteurs restent mais témoigneront de la censure et de l’état de terreur dans lequel ils ont vécu. Durant cette période, Trillo s’associe à Alberto Breccia sur Buscavidas (éd. Rackham), où ils jettent un regard cynique et désemparé sur leur société.
À la chute du régime, Carlos Trillo reprend ses nombreuses collaborations avec des dessinateurs tels que Juan Gimenez, Eduardo Risso, Enrique Breccia, ou encore Domingo Mandrafina. Avec ce dernier, il signe La Grande Arnaque et L’Iguane (éd. iLatina), imprégnés de l’expérience de la dictature, puis la grande saga new-yorkaise des Spaghetti Brothers (éd. Vent d’Ouest).

Fiche rédigée par Théo Ancelin.