Fiche numéro : 6
James Noël
LES ILLUMINATIONS DE NOEL
Poète haïtien né à Hinche en 1978, James Noël a édifié en quelques livres un petit temple profane dédié à la poésie incarnée, vivifiante et profondément ancrée dans "la vie immédiate" chère à Paul Eluard. Ici, la poésie exhale avec plénitude son sens du dialogue avec le vivant, le sang vivible du vitrier, celui dans lequel on lit le monde avant de le boire. James Noël nous demande d'aimer à bras-le-corps. Tout poème est une langue mise en situation d'émeute, nous dit-il ; grâce à lui la poésie sonne le rappel du corps et du mouvement dans le verbe.
James Noël est actuellement en résidence d'écriture à Vincennes d'aoüt à fin décembre 2010.
Portés par les mots
nous allons procéder
sans faire d'histoire
à l'évasion
la plus spectaculaire
de notre histoire
Ces quelques vers d'Evasion, issus du recueil, Des poings chauffés à blanc (Editions Bruno Doucet) résonnent comme une profession de foi, celle d'un poète épris de liberté et dont les bras chargés de mots battent pour aider son corps à quitter le sol, afin de considérer le monde qui nous entoure autrement qu'à l'horizontal. Mais qu'on ne s'y trompe pas, James Noël n'a rien à voir avec l'image imbécile du poète niaiseux au verbe délicat et geignard. Si sa poésie procède de l'illuminations, lui n'est pas illuminé pour deux sous. Dans son oeuvre fuse l'énergie de l'engagement physique, celle du corps à corps avec les mots, quitte à prendre l'idée même de poésie à rebrousse-poil :
Je n'aime pas la poésie
elle fait trop de mal aux poètes
je n'aime pas les poètes
qui font chier la poésie
Les poings chauffés à blanc sont ceux du poète qui fulmine face à la déroute général du monde et qui interpèle les fossoyeurs de la beauté originelle. C'est en celà que crépite entre ses vers l'essence, la flamme rimbaldienne de James Noël, son frère d'armes poétiques auquel il adresse son Crime de non-retour.
Le poète-vitrier nous offre mainte fois la possibilité de voir notre reflet dans le miroitement de l'encre versée. Nous pouvons en effet nous apercevoir, le coeur battant, face à l'être aimé, la raison dévastée par la chair. Nous pouvons trouver chez lui ce chant profond qui nous envahit parfois lorsque nous nous abandonnons à l'idée de n'être qu'une île, un point sur la mer, une tête d'épingle dans l'univers, point de convergence de toutes les tristesses et de toutes les révoltes.
La poésie de James Noël entre en effraction dans la maison-poésie pas toujours très bien tenue. James Noël est désormais un écrivain de salut public.
A lire :
Chez Vents d'ailleurs, Fleur de Guernica, illustré par Pascale Monnin, et Le sang visible du vitrier.
Aux Editions Bruno Doucet, Des poings chauffés à blanc
Aux Editions Albertine, Rectoverso, avec Dominique Maurizi.
Pascal Thuot
Poète haïtien né à Hinche en 1978, James Noël a édifié en quelques livres un petit temple profane dédié à la poésie incarnée, vivifiante et profondément ancrée dans "la vie immédiate" chère à Paul Eluard. Ici, la poésie exhale avec plénitude son sens du dialogue avec le vivant, le sang vivible du vitrier, celui dans lequel on lit le monde avant de le boire. James Noël nous demande d'aimer à bras-le-corps. Tout poème est une langue mise en situation d'émeute, nous dit-il ; grâce à lui la poésie sonne le rappel du corps et du mouvement dans le verbe.
James Noël est actuellement en résidence d'écriture à Vincennes d'aoüt à fin décembre 2010.
Portés par les mots
nous allons procéder
sans faire d'histoire
à l'évasion
la plus spectaculaire
de notre histoire
Ces quelques vers d'Evasion, issus du recueil, Des poings chauffés à blanc (Editions Bruno Doucet) résonnent comme une profession de foi, celle d'un poète épris de liberté et dont les bras chargés de mots battent pour aider son corps à quitter le sol, afin de considérer le monde qui nous entoure autrement qu'à l'horizontal. Mais qu'on ne s'y trompe pas, James Noël n'a rien à voir avec l'image imbécile du poète niaiseux au verbe délicat et geignard. Si sa poésie procède de l'illuminations, lui n'est pas illuminé pour deux sous. Dans son oeuvre fuse l'énergie de l'engagement physique, celle du corps à corps avec les mots, quitte à prendre l'idée même de poésie à rebrousse-poil :
Je n'aime pas la poésie
elle fait trop de mal aux poètes
je n'aime pas les poètes
qui font chier la poésie
Les poings chauffés à blanc sont ceux du poète qui fulmine face à la déroute général du monde et qui interpèle les fossoyeurs de la beauté originelle. C'est en celà que crépite entre ses vers l'essence, la flamme rimbaldienne de James Noël, son frère d'armes poétiques auquel il adresse son Crime de non-retour.
Le poète-vitrier nous offre mainte fois la possibilité de voir notre reflet dans le miroitement de l'encre versée. Nous pouvons en effet nous apercevoir, le coeur battant, face à l'être aimé, la raison dévastée par la chair. Nous pouvons trouver chez lui ce chant profond qui nous envahit parfois lorsque nous nous abandonnons à l'idée de n'être qu'une île, un point sur la mer, une tête d'épingle dans l'univers, point de convergence de toutes les tristesses et de toutes les révoltes.
La poésie de James Noël entre en effraction dans la maison-poésie pas toujours très bien tenue. James Noël est désormais un écrivain de salut public.
A lire :
Chez Vents d'ailleurs, Fleur de Guernica, illustré par Pascale Monnin, et Le sang visible du vitrier.
Aux Editions Bruno Doucet, Des poings chauffés à blanc
Aux Editions Albertine, Rectoverso, avec Dominique Maurizi.
Pascal Thuot