Le fils

De 1849 à nos jours, trois destins, trois générations d'une famille puissante au Texas. Avec un souffle de géant, Philipp Meyer met à nu une mythologie américaine tachée de sang. Admirable à tous points de vue.

"On a prophétisé que je vivrais jusqu'à cent ans et maintenant que je suis parvenu à cet âge je ne vois pas de raisons d'en douter. Je ne meurs pas en chrétien bien que mon scalp soit intact et si les prairies des chasses éternelles existent, alors c'est là que je vais." L'homme qui s'adresse à nous dans son grand âge se nomme Eli McCullough, le Colonel pour les intimes. Enlevé puis adopté par les Comanches à l'orée de l'adolescence, il se forgera dans la brutalité de cette expérience une robustesse tant mentale que physique prompte à faire de lui un homme riche, puissant et irrascible.

Il en va tout autrement de son fils Peter, sensible et lucide, qui aura un mal fou à exister dans l'ombre d'un tel patriarche biblique. Son journal intime, bouleversant de courage, témoigne de son refus obstiné des codes sauvages de l'Ouest et de sa violence originelle traverstie en glorieuse épopée civilisatrice. Jeannie, l'arrière petite-fille, héritière conquérante de cet immense empire terrien et pétrolier, incarne quant à elle le crépuscule d'une puissance désormais gonflée d'orgueil et rongée par les mensonges et la cupidité.

Anti-western flamboyant, charge héroïque aux mouvements symphoniques, "Le fils" de Philipp Meyer n'oublie pas de rendre justice aux oubliés de l'Histoire officielle que sont les Indiens et les Mexicains. Le lecteur sortira ébranlé et fiévreux d'avoir tant chevauché, tant vécu, et hanté des jours durant par les voix de ce roman fleuve. Grandiose.